Au milieu de nulle part. L’expression consaçree, 100 fois entendue et répétée pour exprimer l’endroit où nous nous trouvons en ce moment. Quelque part dans la Pampa. Au milieu ( ? tiens, il y a un milieu à ce nulle part? ) au milieu dis-je, D’une immense étendue de cailloux accumulés par l’érosion des Andes proches sur des périodes de centaines de millions d’années, sur laquelle poussent parcimonieusement quelques rares buissons d’épines, quelques touffes d’herbe sèche, l’herbe de la pampa qui n’a ici ni la taille ni la vigueur de celle qu’on implante à tord et à travers dans nos jardins, où paissent si on ose dire des moutons mal rasés et tout gris, des chevaux en liberté, parfois dans les creux les plus humides, quelques vaches trop maigres, ainsi que des guanacos, des nandous… Au loin la plaine s’arrête sur les flancs des premiers reliefs montagneux -qui n’atteignent par ici pas beaucoup plus de 2000 mètres- à moins qu’elle ne se transforme en collines pelées. Les arbres sont inexistants ici, alors que ce matin encore nous traversions les forets d’alcerces - les cousins des séquoias qui luttent difficilement contre l’envahissement des sapins d’Europe trop envahissants - ici on n’en trouve que le long des rivières, arroyos plus ou moins permanents, ou alors autour des bâtiments des estancias chichement clairsemées dans le paysage, à raison d’une tous les dix kilomètres. Réellement au milieu de nulle part, en medio de nada. Pourtant on vit ici. Pas nombreux, mais quand même, Habitués aux transits des touristes qui montent ou descendent vers les visites des glaciers. On les trouve au cafe du coin, qui sert d’albergue et de tienda, avec leur bottillons, leur béret basque ou leur grand chapeau, calmes et décontractés. Oui, il est possible de vivre ici, différemment d’ailleurs sans doute, mais vivre, qui sait si pas mieux qu’ailleurs?