Faire du tourisme, c’est aussi s’intégrer à la population, vivre et rencontrer à notre échelle, les mêmes conditions de vie, les mêmes difficultés, et le résoudre, sinon avec les mêmes moyens, du moins de manière semblable. C’est descendre en ville depuis Hay Mohamadi jusqu’à Taalborj et revenir par les ruelles qui traversent le quartier des amicales en nous arrêtant à un magasin ou l’autre. Et si nous sommes pressés, héler un petit taxi pour arriver plus vite. Je suis un retraité, et je me conduis comme tel, mais je remarque au passage comme chacun ici a une activité typique : Les retraités, bien sur, habituellement d’aimables vieillards dont l’âge ne dépasse pas forcément le mien, comme ce professeur d’univ de Sefrou qui s’estimait fort vieux à 64 ans : une attitude posée, des pas mesurés et l’assistance de tout qui a du respect leur donnent un role social. Les enfants qui reviennent ou vont à l’école nous saluent de leur trois mots de français appris en classe -« bonjour monsieur comment ça va ? » - et seuls les plus avancés sauront répondre à la question suivante - « quel âge as-tu ? ». et les plus hardis s’essaient aux fameux « un stylo » ou « un cahier » qui ont déjà fait couler beaucoup d’encre. Les ouvriers du bâtiment s’activent du matin au soir, qui à casser un mur de béton - première activité de la construction, abattre ce qui doit être remplacé - qui à remonter des sacs de sable et de ciment du niveau rue à celui du troisième étage avec une simple poulie et un câble de nylon - qui à cimenter le mur construit, perché en équilibre sur une poutre accrochée à six mètres de hauteur. Le petit épicier gère l’affluence des clients de 18h00, quand la vie reprend dans le quartier, entre les ménagères pour les derniers légumes et les jeunes qui réclament leur barre chocolaté, leur cigarette ou leur pot de yaourt… et certains à crédit ! Le marchand de sardines qui remonte du port en criant sur son passage « poisson, poisson ! » Ses sardines sont fraiches, à peine sortie de l’eau, bien enveloppées d’une couche de glace pilée. Bien sur il ne faut pas tarder à les acheter, je ne sais pas comment seront ce soir celles qu’il n’aura pas vendues… Les filles vont à l’école, ou faire les courses pour leur maman. Jusqu’à l’âge où on pense qu’elles doivent être mariées, et alors, elles se voilent, se cachent et attendent gentiment le mari choisi par la tribu, à moins qu’elles ne réussissent à se sentir libres et à se comporter comme celles de chez nous. Et alors elles ne sont ni moins ni plus belles que les autres, peut être un tout petit peu plus élégantes en permanence, sous la pression des regards.