Comme Ushuaya, Kagoshima, l’île du Prince Edward, et d’autres lieux emblématiques, le cap Comorin est un « Finisterre », un endroit que l’on ne quitte qu’en reculant.

C’est au carrefour des « trois océans », mer d’Arabie ou Golfe Persique, golfe du Bengale et Océan Indien que les cendres de Ghandi ont été dispersées, c’est ici qu’on a élevé une statue de 133 pieds de haut à Tiruvalluvar, un poète philosophe tamoul du premier siècle avant J-C, c’est ici que Vivekananda, le philosophe penseur du 19ieme siècle, qui a influencé la pensée de Gandhi, a médité trois jours durant avant de participer à la première conférence mondiale sue les religions, c’est ici que depuis de très nombreux siècles, les dévots viennent se baigner dans un rite de purification qui rappelle par son symbole, les eaux du Gange, sans imiter les excès de Bénarès, et sans les vaches de Rameshwara.

Kanyakumari est une petite bourgade toute simple, calme, malgré les nombreux pèlerins qui défilent. Il n’y a pas de port au Cap Comorin, pas de baie abritée comme à Kagoshima, seulement la mer de tous côtés. Quelques hôtels vieillots et remplis de boys pour le service, l’un ou l’autre établissement plus luxueux en bord de mer pour les plus riches, et dans le quartier de pêcheurs, des maisons colorées comme nous en avons vu à Buenos Aires.

Une gare de trains, terminus sud de toutes les lignes de l’Inde, des « lodges » pour les gens moins aisés, des marchands de bondieuseries et de toutes sortes de choses dont on ne peut pas avoir besoin, qu’on achète juste pour se souvenir que cette visite est un loisir autant qu’une œuvre pie. Le soir venu, chacun se hâte vers la gare, pour repartir parle train qui remonte vers le Nord, vers Madras, Bombay et même New Dehli.

Il y a un temple, un mémorial à Vivekananda, un monument à Gandhi. C’est sans doute pour cela que les chrétiens y ont édifié plus de sanctuaires que les indous eux-mêmes, basilique sainte Marie rédemptrice, église saint Joseph, Sacré Coeur, chapelles multiples. Les statues des saints ont les mêmes couleurs que les dieux indous, reçoivent les mêmes colliers de fleurs et les mêmes lampes à huile, les sanctuaires ont les mêmes énormes boites métalliques destinées à recevoir les offrandes (« donations »)

Les guides nous avaient promis des plages de sable fin, elles existent peut-être, mais sont inaccessibles, puisque sans guest house à distance raisonnable Et donc, après avoir fait le tour de cette curiosité, manqué les spectacles du lever comme du coucher du soleil pour cause de brume persistante, nous nous décidons à aller voir ailleurs.

Dans l’après-midi, nous arrivons à Kovalam où nous avons séjourné l’an dernier. L’hôtel Peacock nous attend, agréablement situé en retrait du bord de mer, dans les cocotiers. Quelques jours de farniente nous feront le plus grand bien, le long d’une mer déjà rencontrée à Ceylan, le golfe persique. Sans avoir tout vu, cette mer me semble plus accueillante et plus reposante que le golfe du Bengale qui borde la côte de l’Inde à Mamalapuram et à Pondichery.